Depuis plusieurs années l’école malienne traverse une zone de turbulences symbolisée par les tensions multiples et la stagnation du taux de réussite aux différents examens de fin d’année sous la barre des 50%. Malgré la satisfaction affichée par les organisateurs, la tendance peine à s’inverser. Signe d’un malaise profond, cette situation interpelle l’ensemble des acteurs de l’école.
Outre les défis liés à l’effectif pléthorique dans les classes, la récurrence des revendications relatives à l’amélioration des conditions de vie et travail des enseignants et l’insécurité dans l’espace scolaire, le faible taux de réussite dans les différents examens de fin d’année est un autre défi auquel l’école malienne est confrontée depuis plusieurs années. Comme l’année précédente, le taux de cette année stagne sous la barre des 50%. Bonne organisation, rigueur de la surveillance dans les salles d’examens ? Quoi qu’il en soit, la récurrence du faible taux de réussite est loin d’être le signe d’une école performante. L’argument de la bonne organisation et de la rigueur de la surveillance dans les salles d’examens, quoique valable ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt de la chute du niveau des apprenants. Dénoncée de plusieurs décennies, la baisse du niveau n’est pas étrangère au faible taux de réussite. Face à l’inefficacité des mesures préconisées pour rehausser la qualité de l’enseignement, a-t-on opté pour le sauvetage des années scolaires au détriment de l’école qui attend d’être sauvée ? Au cœur des préoccupations de nombreux observateurs, l’école peine à retrouver un second souffle à cause de la persistance des défis qui l’a minent depuis 1979. De cette date à nos jours, il y a eu certes des améliorations, cependant l’essentiel des anciens défis amplifiés par d’autres nouveaux dont la violence dans l’espace scolaire, les effectifs pléthoriques, l’effritement de l’autorité de l’enseignant, la prolifération des écoles privées dont bon nombre ne sont pas en règles vis-à-vis des législations en vigueurs entre autres, imposent une nouvelle réflexion et une nouvelle approche des questions liées à l’éducation afin de remettre l’école sur les rails qu’elle ne devait jamais quitter à savoir discipline, travail et performance. La nécessité de faire l’évaluation de la politique pyramidale introduite par feu Mamadou Lamine Traoré, ancien ministre de l’éducation dont l’une des mesures fortes ont été la suppression de la 2ème partie du Bac, du CEP et de l’interdiction du châtiment corporel, est un impératif. Pour certains observateurs, ces réformes, faute d’encadrement et d’accompagnement adéquats ont négativement impacté l’éducation déjà confrontée à l’épineuse problématique de l’insuffisance des salles de classe et d’enseignants, de l’inéquation entre marché de l’emploi et formation et de l’irruption du politique dans l’espace scolaire. Pour les observateurs, bon nombre de ces réformes ont conduit à l’effritement de l’autorité de l’enseignant et porté un coup au niveau des apprenants à travers la réduction du nombre des évaluations. Introduites sans grandes précautions et de préparations adéquates, les désagréments ont pris le pas sur les effets bénéfiques escomptés des reformes estiment les observateurs.
Le faible taux de réussite aux examens, loin d’être une fatalité tire probablement sa source du cumul des faiblesses et l’option du sauvetage de l’année scolaire par la tenue des examens depuis plusieurs décennies ne sert pas l’école. Pour conjurer le faible taux de réussite, l’heure n’est plus à tenue des forums ou les états d’âmes relégués au second plan les préoccupations et la recherche de boucs émissaires, mais plutôt à un débat franc et sincère sur les maux qui minent l’éducation depuis trop longtemps. Après le sauvetage des années scolaires, il est plus que temps de s’investir pour sauver l’école.
Bakary Sangaré