« Les poursuites judiciaires relatives aux violences sexuelles liées aux conflits au Mali : Comment surmonter les obstacles ? » est le thème du séminaire international sur les violences sexuelles liées aux conflits organisé, mardi dernier, par Avocats sans frontières Canada. Il s’agit, pour celui-ci, de mobiliser et outiller les acteurs et actrices de la chaîne pénale malienne en matière de poursuites des cas de VSLC, et de renforcer les capacités des organisations de la société civile dans la lutte contre l’impunité des VSLC et l’accès à la justice des victimes.
Depuis 2012, le Mali est confronté à une crise multisectorielle dans laquelle ont lieu des violations de droits humains (DH) constitutives des crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Ces crimes sont notamment qualifiables d’exécutions extrajudiciaires, de détentions arbitraires, d’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans, de viols et d’autres violences sexuelles, d’actes de torture et de destruction de patrimoine culturel.
Malgré ce constat, les réponses judiciaires demeurent insuffisantes particulièrement en matière de violences sexuelles liées aux conflits (VSLC). En effet, l’absence de poursuite des enquêtes et la non-tenue des procès représentent des obstacles persistants au droit des victimes à la justice et à la lutte contre l’impunité pour les VSLC3. En dépit de la recrudescence et de la récurrence des VSLC, et des conséquences causées par ce phénomène, peu d’actions judiciaires sur les VSLC aboutissent notamment en ce qui concerne les plaintes de victimes introduites depuis 20144. De même, l’absence de protection des victimes et témoins par la législation malienne s’additionne aux facteurs décourageants le recours des victimes de VSLC à la justice.
A cette occasion, le représentant de l’ONG Avocats sans Frontières, Brian Menelet a fait savoir que l’accès à la justice des victimes et la lutte contre l’impunité de VSLC, représente l’un des principaux défis concernant l’accès aux droits et à la justice des femmes, des filles et autres personnes en situation de vulnérabilité (PSV). Il rappelé que ASF Canada a signé un accord de contribution avec le gouvernement canadien à travers Affaires Mondiales Canada (AMC) pour mettre en œuvre le projet intitulé « Appui à la Justice et la Paix au Mali » (JUPAX), dont le résultat ultime est que : « les femmes, les filles et autres PSV font de leurs droits humains une réalité dans une perspective d’égalité des genres, de transformation des relations de pouvoir, de réconciliations et de paix au Mali (autonomisation par le droit) ». Concrètement, il s’agit, pour lui, de favoriser l’autonomisation juridique desdites cibles afin qu’elles puissent revendiquer et mettre en œuvre leurs DH de manière effective, et participer aux efforts visant à combattre les VBG et l’impunité, des fléaux qui minent le vivre-ensemble ainsi que le développement socio-économique.
Au cours de son intervention, il a souligné la nécessité de créer un espace de dialogue direct entre les acteurs et actrices de la chaîne pénale en plus de la société civile travaillant dans l’accès à la justice des victimes. Et d’ajouter ASF Canada se préoccupe de l’absence de réponses judiciaires aux cas de VSLC. En effet, les procédures judiciaires de VSLC sont sans avancée depuis 2014 devant certaines juridictions nationales tel que le Pôle judiciaire spécialisé de lutte contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière (PJS) ayant désormais la compétence exclusive pour instruire les affaires de crimes internationaux dont les VSLC. ASF Canada observe que les enquêtes en cours concernant plusieurs dossiers de VSLC stagnent, et que de nouvelles enquêtes tardent à être initiées en raison de divers facteurs, tels que l’inaccessibilité des zones touchées par l’insécurité ou la lenteur des autorités étatiques à poursuivre les responsables de ces actes. Or, actuellement les actes de VSLC augmentent et s’ancrent en tant qu’“armes de guerre” commises à l’égard des femmes et filles majoritairement, des enfants et voire des hommes.
Malgré la difficulté à quantifier les cas de VSLC en raison du contexte d’insécurité persistante, plusieurs rapports d’enquêtes d’organisations internationales signalent la persistance de ces violences, avec un nombre croissant de localités affectées à travers le territoire malien.
La représentante des victimes liées aux conflits, a pour sa part salué l’initiative qui vise à renforcer les capacités des organisations de la société civile dans la lutte contre l’impunité des VSLC. Elle a en outre souligné que l’accès à la justice des victimes demeure une préoccupation majeure aux yeux de la société civile.
M.S