Contre toutes attentes, l’inscription des dépenses liées aux futures élections dans le budget de 2025 n’a pas soulevé de réaction au sein de la classe politique qui montrait pourtant des signes d’impatience pour le retour à l’ordre constitutionnel. Le peu d’intérêt affiché par la classe politique face à une annonce qui répond à une longue attente est-il le signe d’un scepticisme ou d’une lassitude ?
Après un premier rendez-vous manqué avec le retour à l’ordre constitutionnel et l’expiration du délai de la Transition, une frange non négligeable de la classe politique avait multiplié les actions pour réclamer la présentation d’un nouveau chronogramme assorti de la tenue des élections dans le plus bref délai. A l’époque, l’Appel du 20 Février, initié pour la circonstance par Issa kaou Djim faisait office de porte-étendard des opposants à une nouvelle prolongation de la transition après l’expiration du second délai. Un gouvernement provisoire à l’étranger avec à sa tête un influent militant de l’Appel du 20 Février fut installé pour mettre la pression sur les autorités de la transition. N’ayant pas pu rallier une opinion nationale largement favorable aux initiatives de refondations et soutenant la lutte acharnée des autorités transitoires contre le terrorisme, la classe politique s’est emmurée dans le silence tout en scrutant l’horizon à la recherche d’un signe annonciateur du retour à l’ordre constitutionnel.
Outre l’opérationnalisation des nouvelles régions, le lancement de la révision des listes électorales, l’augmentation du budget de l’AIGE, l’inscription dans le budget 2025 des dépendances des élections rallonge la liste des signes avant-coureur du retour à l’ordre constitutionnel réclamé à cor et cri par des formations politiques et organisations de la société civile. Face à l’abondance de ces signes annonciateurs, le silence observé par la classe politique dans son ensemble, suscite des interrogations. Lassitude ? Scepticisme ?
Une analyse sommaire de la réalité sociopolitique incline à penser que le silence de la classe politique tient des deux. Echaudée par le léger report dont la décision a été qualifiée d’unilatérale à l’époque et l’absence de chronogramme après l’adoption du budget 2025 qui prend en compte les dépenses liées à l’organisation des élections, la classe politique est probablement dans l’attente de garanties relatives au respect d’un éventuel calendrier.
Craint-elle un rebondissement ? Le boycott des rencontres initiées par le ministère de l’Administration territoriale et par l’AIGE de gestion des élections motivé par la détention des responsables politiques n’est-il pas l’arbre qui cache le scepticisme de la classe politique ? L’autre raison du silence des partis politiques est probablement la lassitude à cause du désaveu dont elle fait l’objet depuis la chute du régime IBK.
Accusée par l’immense majorité de la population d’être responsable de la détérioration du pays, la classe politique a du mal à regagner l’estime et les faveurs de l’opinion .Toute chose indispensable pour la réalisation d’un score honorable dans une élection. La morosité de la classe politique due probablement aux effets conjugués du scepticisme et de la lassitude suscitent des interrogations sur l’ambiance des futures élections. Certes il est prématuré de parler d’un boycott au demeurant peu envisageable quand on sait que pour bon nombre des acteurs politiques, ce sont l’unique voix pour ce mettre à l’abri du besoin. Cependant, une élection dans un climat marqué par des visages inconnus du grand public n’est pas à écarter. Quels seront les partis politiques sur la ligne de départ de la course au palais de Koulouba ? Les paris sont ouverts.
Bakary Sangaré