Un émissaire onusien débarque, multiplie les rencontres feutrées avec les officiels, distille des éléments de langage soigneusement calibrés devant la presse et repart, laissant derrière lui un conflit toujours plus envenimé. Cette fois, c’est Huang Xia, l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour la région, qui s’est prêté au jeu, reçu ce lundi 10 mars 2025 par Félix Tshisekedi à la Cité de l’Union Africaine.
Officiellement, cette visite s’inscrit dans la préparation d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies prévue le 4 avril prochain, censée examiner l’application de la résolution 2773 et, plus largement, « assurer la paix et la sécurité dans la région des Grands Lacs ». À en croire Huang Xia, l’ONU est pleinement mobilisée, tout comme les organisations régionales et l’Union Africaine. Un discours convenu, martelé à chaque crise, mais dont l’efficacité sur le terrain reste à démontrer.
La RDC est engluée dans un conflit persistant à l’Est, où le M23, soutenu par le Rwanda selon Kinshasa, continue de gagner du terrain. La communauté internationale, elle, oscille entre indignation verbale et immobilisme stratégique. Washington et Paris se fendent de quelques communiqués de condamnation, mais rien ne change réellement. Dans ce contexte, la tournée de Huang Xia ressemble davantage à un exercice de relations publiques qu’à une réelle offensive diplomatique.
L’envoyé spécial onusien évoque la nécessité de « désescalade » et d’une « solution durable ». Mais qui peut encore croire en la capacité de l’ONU à imposer la paix dans une région où les intérêts économiques et stratégiques des grandes puissances l’emportent largement sur les bonnes intentions affichées ? Depuis des décennies, la mission onusienne en RDC (MONUSCO) accumule les échecs et suscite de plus en plus de méfiance parmi la population congolaise.
Une RDC livrée à elle-même ?
Tshisekedi, qui a fait de la restauration de l’autorité de l’État à l’Est un cheval de bataille, sait qu’il ne peut compter que sur lui-même. Son rapprochement avec l’Angola et ses efforts pour réactiver les alliances régionales en témoignent. Quant aux Nations Unies, elles se contentent de « suivre la situation avec inquiétude », une posture qui frôle l’indécence face à l’ampleur du drame humain en cours.
Au final, que restera-t-il de la visite de Huang Xia ? Probablement une poignée de déclarations diplomatiques déjà oubliées avant même que l’envoyé spécial ne monte dans son avion. Pendant ce temps, sur le terrain, la guerre continue.
Seydou Fané