Face à la flambée des prix et l’isolement de la localité, un habitant interpelle les autorités et exhorte le chef du village à agir.
La situation à Boni, localité du centre du Mali, devient chaque jour plus intenable. Sous blocus des groupes armés terroristes (GAT) depuis vingt mois, la ville est en proie à une insécurité aiguë, doublée d’une crise alimentaire qui ne cesse de s’aggraver. Dans une lettre ouverte, Oumarou M. Tamboura, diplômé en droit international public et originaire de Boni, interpelle le nouveau chef du village, issu de la lignée des Dicko, lui demandant de prendre ses responsabilités et d’alerter les autorités sur l’ampleur du drame.
À Boni, les produits de première nécessité atteignent des prix exorbitants. Le sac de riz de 50 kg se vend à 65 000 francs CFA, un kilo de sucre à 3 000 francs, un morceau de savon entre 900 et 1 000 francs. Une inflation galopante qui pousse les habitants à des expéditions périlleuses : « Chaque nuit, plusieurs femmes quittent discrètement le village pour parcourir entre 20 et 30 km dans l’espoir de rapporter quelques kilos de riz ou de mil. Nombre d’entre elles ne reviennent jamais », écrit Oumarou M. Tamboura.
Les plus vulnérables, en particulier les femmes et les enfants de moins de quinze ans, sont réduits à la recherche de feuilles vertes pour subsister, s’exposant à des violences de la part des groupes armés qui contrôlent la région.
L’appel à l’action du chef du village
Dans sa lettre, l’auteur s’adresse directement au nouveau chef du village, récemment intronisé après le décès de son père, Oumar Amirou. Tout en lui présentant ses condoléances et ses félicitations, il le somme de briser le silence et de faire entendre la voix des habitants. « Prenez votre courage à deux mains et rendez-vous auprès des autorités administratives pour leur expliquer que ceux qui ont mis Boni sous blocus ne sont pas les enfants de Boni », exhorte-t-il.
Il insiste sur la loyauté des habitants envers l’État malien, dénonçant la désinformation qui les présenterait comme des rebelles. « La population de Boni est malienne et respectueuse des lois de la République. Jamais, au grand jamais, elle ne prendra les armes contre le Mali », martèle-t-il.
Au-delà de l’urgence humanitaire, l’auteur appelle le chef du village à user de son influence pour obtenir un ravitaillement militaire rapide. Il l’exhorte également à se rendre auprès des déplacés de Boni réfugiés à Douentza, afin d’évaluer leur situation et de porter leur voix.
« Vous êtes un homme d’expérience. Faites entendre la vérité sur Boni, de la cité administrative à Kati, de Sikasso à Tinzawaten », implore-t-il, insistant sur la nécessité de rétablir l’image du village et de mobiliser les autorités pour briser l’isolement.
Une situation qui interpelle l’État
La lettre de Tamboura, bien que s’adressant directement au chef du village, est un message plus large adressé aux autorités maliennes. Elle met en lumière une réalité que de nombreuses localités du centre du Mali subissent : l’isolement, la flambée des prix, la famine et l’insécurité.
Seydou Fané
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