À l’occasion de la Journée mondiale de la santé, célébrée le lundi 7 avril, un rapport des Nations unies dresse un constat en demi-teinte sur l’état de la santé maternelle dans le monde. Si des progrès indéniables ont été réalisés au cours des deux dernières décennies, notamment dans plusieurs pays à faibles revenus, la dynamique de réduction de la mortalité maternelle s’essouffle depuis 2016.
Dans l’avant-propos de l’étude, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, salue les efforts accomplis, y compris « dans certains des pays les plus pauvres du monde ». Le document, élaboré sur des données compilées par plusieurs agences onusiennes et le Groupe de la Banque mondiale, cite en exemple le Rwanda et le Sri Lanka, où l’accès aux sages-femmes et aux soins en milieu rural a permis de faire chuter sensiblement les décès liés à la grossesse et à l’accouchement.
Les progrès enregistrés tiennent également aux innovations médicales et à la diffusion de solutions peu coûteuses mais efficaces. Le rapport met ainsi en lumière l’utilisation d’un simple dispositif, appelé « drap de collecte », qui permettrait de réduire de 60 % les saignements post-partum, cause majeure de décès chez les femmes après l’accouchement.
Malgré ces avancées, la mortalité maternelle demeure à un niveau alarmant. En 2023, environ 260 000 femmes sont mortes de complications liées à la grossesse ou à l’accouchement, l’équivalent d’un décès toutes les deux minutes. La quasi-totalité de ces morts auraient pu être évitées avec un accès suffisant à des soins médicaux adaptés, souligne l’OMS.
Le rapport souligne également un ralentissement notable des progrès depuis 2016, compromettant les objectifs de développement durable fixés par la communauté internationale pour 2030. Les causes sont multiples : affaiblissement des systèmes de santé, baisse des financements internationaux, montée des conflits, et inégalités persistantes.
Les inégalités géographiques demeurent criantes. En Afrique subsaharienne, une femme a 400 fois plus de risques de mourir en couches qu’en Australie ou en Nouvelle-Zélande, selon le bilan dressé par l’ONU. La région concentre près de 70 % des décès maternels à l’échelle mondiale. D’autres zones, comme l’Afrique du Nord, l’Asie du Sud-Est ou l’Amérique latine, voient leurs progrès ralentir, voire stagner.
L’accès aux soins reste inégal. De nombreuses femmes n’ont toujours pas accès à la contraception moderne, au suivi prénatal ou aux soins obstétricaux d’urgence. D’autres doivent se rendre, parfois trop tardivement, dans des établissements mal équipés et mal approvisionnés.
« Les décès évitables dus à la mortalité maternelle sont profondément ancrés dans la pauvreté et les inégalités », insiste Tedros Adhanom Ghebreyesus, qui appelle à un sursaut mondial pour élargir l’accès aux soins de qualité. Il plaide pour un renforcement des compétences des personnels de santé et une meilleure protection des droits des femmes.
« La mortalité maternelle n’est pas un mystère », affirme-t-il. « Nous en connaissons les causes et nous disposons des outils pour la prévenir. La question n’est pas de savoir si nous pouvons mettre fin à ces décès, mais si nous y parviendrons. »
D. Diarra