Après le pacte social pour la stabilité et celui de l’entente nationale, c’est au tour de la charte pour la paix et la réconciliation en cours d’élaboration de prendre la relève pour combler le fossé qui sépare les Maliens. Au regard de l’échec des initiatives précédentes élaborées sur la base des recommandations issues des rencontres nationales, ne faut-il pas chercher les causes profondes de la division dans la gouvernance ?
L’éclatement de la crise multiple forme en 2012 a révélé l’ampleur du fossé qui sépare les Maliens. Au-delà des grandes villes, l’effritement de la cohésion sociale a gagné tous les pans et toutes les couches de la société. Face à cette division qui constitue une grande menace sur l’existence du pays en tant que nation, les différents régimes se sont engagés dans la recherche de solution à travers l’organisation des débats et échanges entre Maliens à l’échelle nationale. Malgré la participation massive du peuple à ces assises et débats dont la réussite a été saluée par les organisateurs et les initiateurs, la division persiste et semble même se propager. Si certains observateurs ont mis en cause la légitimité des participants et la pertinence du choix des termes de références de ces rencontres, d’autres pointent du doigt la mauvaise gouvernance qui prévaut depuis plusieurs décennies. Pour cette opinion, au-delà de leur incapacité à proposer un modèle de développement politique, économique et social inspiré des cultures du pays, les régimes successifs se sont illustrés par leur impuissance face à la corruption qui gangrène l’administration publique avec son corolaire de népotisme, clientélisme et autres trafic d’influence. A les en croire, la division actuelle qui est devenue une préoccupation majeure prend sa source dans le cumul des frustrations engendrées par la mauvaise gouvernance. Aujourd’hui, estime cette opinion, c’est l’Etat qui doit plutôt se réconcilier avec les gouvernés dont une grande majorité a été et continue d’être victime de la mauvaise gouvernance en s’imposant le respect des lois et des règles qu’il a lui-même élaboré et arrêter de catégoriser les Maliens en bon et mauvais. Cette dernière pratique qui s’est exacerbée sous la transition ne milite pas en faveur de la réconciliation. L’autre action que l’Etat doit mener est la mise sur la touche les responsables soupçonnés de corruption ou d’incompétence avérée aux fins d’instaurer une gouvernance vertueuse. C’est à ce prix que le peuple se réconciliera avec lui-même. Les initiatives de réconciliations des différents régimes sont certes salutaires cependant, elles ne sauraient porter fruit en occultant la responsabilité de l’Etat dans la division qui prévaut. Ainsi, l’Etat doit revêtir son manteau d’arbitre impartial, assurer son rôle de senseur en s’appuyant sur les lois et promouvoir un développement endogène. En attendant ce déclic indispensable pour la réussite de la réconciliation, la perspective de l’élaboration d’une charte représente l’opportunité d’une unité nationale à saisir.
Bakary Sangaré